mardi 5 août 2014

[Cinéma] Near Death Experience, de Benoît Delépine et Gustave Kervern

Near Death Experience
de Benoît Delépine et Gustave Kervern
(France, 2013)

Sortie le 10 septembre 2014

★★

Comme à leur habitude, les grolandais Delépine et Kervern réussissent avec « Near Death Experience » un film unique et hors des normes. Dans une mise en scène décalée (autant au sens propre que figuré), on y voit évoluer un personnage seul, même lorsque du monde gravite autour de lui : la caméra prend le soin de ne jamais montrer les visages des autres personnages, sauf exceptions lorsque le héros crée un véritable contact avec un autre… Un personnage principal, d’ailleurs étrangement interprété par Michel Houellebecq (génie littéraire qui incarne ici avec virtuosité la médiocrité des personnages de ses propres romans), qui se révèle au bout du rouleau, lassé de la vie et près à faire route vers la mort, en quittant son domicile soudainement pour aller se perdre dans les montagnes, isolé de la folie des hommes : métaphores aux contours absurdes et grotesques, qui jalonnent régulièrement le long métrage… Avec cette subtilité grossière, ce décalage permanent, ce désespoir rigolard flirtant avec l’œuvre de Samuel Beckett (on retient l’improbable rencontre au milieu de nulle part d’un homme qui propose à notre personnage un jeu pour enfant dans le sable), les cinéastes parviennent avec une grâce paradoxale à nous parler du mal-être de nos sociétés : la banalité d’une vie quotidienne dénuée de sens, qui manque au fond de l’ivresse qu’elle promettait naguère… « La vie doit être enivrante », se répète intérieurement le personnage comme une litanie magique. Son contenu de conscience, cheminement intérieur disséminé au fil de son cheminement physique, nous aide d’ailleurs avec un humour typiquement grolandais à saisir une parcelle de sa vérité, comme son incapacité à en finir : « Décidément tu parles trop et tu ne te suicides pas assez »… jusqu’à cet acte final, qui a lieu au moment le moins attendu, révélant encore beaucoup sur l’humanité, ou l’absence d’humanité, à travers une dernière rencontre qui ressemblait pourtant à une promesse d’espoir…


Autres films de Benoît Delépine et Gustave Kervern :
Le grand soir (2011)
Mammuth (2010)

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