mercredi 7 avril 2010

Lignes de front, de Jean-Christophe Klotz (France, 2010)



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Note :
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Après avoir réalisé en 2006 un documentaire sur le génocide rwandais de 1994 (« Kigali, des images contre un massacre »), Jean-Christophe Klotz décide de revenir sur le sujet, comme sur une
obsession, par le biais de la fiction… Dans « Lignes de front », il décrit l’itinéraire d’un jeune journaliste, qui accompagne un rwandais Hutu vivant en France à la recherche de sa fiancée
Tutsie, qui n’a pas été rapatriée comme prévu par les Nations Unies. Antoine, le journaliste, va découvrir la terrible réalité sur place, celle d’un génocide pur et simple, auquel le monde et les
forces internationales semblent rester parfaitement indifférents. Au fur et à mesure que le film avance, des cartons viennent comptabiliser le nombre de victimes du massacre et le nombre de jour
depuis le début du conflit… Constat chiffré et journalistique : amer et effrayant avec le recul !

Klotz passe donc à la fiction, sauf que tout est faussé dès le début de son film. Car le scénario ne raconte finalement rien d’autre que sa propre histoire, celle d’un journaliste parfaitement
impuissant devant l’horreur et qui se rend très vite compte que toutes les images qu’il pourra ramener dans son « monde » ne feront pas réagir les gens, qui demeurent tous sourds et aveugles,
tranquilles et conditionnés dans leur petit confort quotidien d’occidentaux, comme si ce qui se passait à l’autre bout du monde n’avait finalement que peu d’importance, ou, encore mieux,
n’existait pas vraiment… La teneur autobiographique du long métrage n’est que plus évidente à la fin du film, lorsque l’on voit le personnage journaliste se prendre une balle dans la hanche dans
les mêmes circonstances que le réalisateur journaliste à l’époque.

Mais c’est aussi la mise en scène, au style profondément documentaire, qui amène « Lignes de front » à la frontière des genres… Le cinéaste se permet d’ailleurs des audaces formelles assez
impressionnantes, plongeant parfois son film dans de profonds silences ou dans des images « aveugles ». Des moments vides, comme entre deux mondes, qui symbolisent l’attente, l’incertitude, le
doute ou même la peur, autant de sentiments par lesquels peuvent passer des reporters au sein d’un conflit armé, dans un pays transformé en zone de non-droit.

Et au milieu de tout ça, de la guerre et de son aberrante absurdité, il y a Jalil Lespert. Impressionnant et charismatique. Troublant comme on ne l’avait encore jamais vu ! Il interprète à la
perfection la descente en enfer de ce personnage d’abord presque innocent et à la fin complètement refermé sur lui-même, comme devenu incapable de comprendre et de vivre en ce monde… Plusieurs
scènes agissent comme un électrochoc : on le voit peu à peu perdre pied et devenir fou lui-même, au beau milieu de la folie d’autres hommes… Avec un personnage aussi intense et tragique, le film
nous pousse à tout remettre en cause et cherche à nous ouvrir les yeux sur une certaine réalité du monde, définitivement atroce et immonde !































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