vendredi 12 juillet 2013

[Critique] La cinquième saison, de Peter Brosens et Jessica Woodworth



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(Belgique, Pays-Bas,
France, 2012)



Sortie le 24 juillet 2013




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Printemps, été, automne, hiver… et puis patatras ! Les habitants d’un petit village de Belgique ne voient soudainement pas revenir le printemps : c’est la fameuse « Cinquième saison » du titre,
une sorte d’hiver éternel… Il faut dire qu’à la cérémonie traditionnelle de la fin de l’hiver, le feu n’a pas pris cette année, et l’on n’a pas pu brûler « tonton hiver », un pantin de paille qui
par ses cendres doit faire renaître le cycle des saisons, et par là même, symboliquement, celui de la vie. Les couleurs du monde refusent alors de revenir, les décors demeurent ternes et sombres,
les graines ne germent plus dans la terre nourricière, les abeilles se meurent… et peu à peu, les hommes vont perdre leur humanité pour sombrer dans la sauvagerie !

Dès les premières images, le film de Peter Brossens et Jessica Woodworth hypnotise. Sa mise en scène, ses plans à la puissance évocatrice forte et ses cadrages atypiques participent à la
fascination que l’on éprouve à la vision de « La cinquième saison » ! Entre vision naturaliste de la misère villageoise (l’inquiétude des habitants devant l’absence de printemps, tous réunis
tristement à l’auberge du village et prêts à céder à l’obscurantisme et à l’intolérance) et compositions lyriques et poétiques (voire même parfois drôles en créant un décalage d’où naît la
surprise, comme lors de l’apparition de cette vache géante, suivi d’un homme et d’une femme à son échelle, qui sont en réalité des marionnettes pour la cérémonie marquant la fin de l’hiver), le
long métrage nous plonge dans un univers atypique et proche du merveilleux, où l’on croise aussi bien deux jeunes gens qui luttent sensuellement et dérivent peu à peu vers l’animalité, un homme
qui tente désespérément d’apprendre à chanter à son coq (en vue de le faire participer à un concours), des villageois participant à un barbecue sous la neige ou encore des autruches dont le
regard caméra final s’avère pour le moins « émeu »-vant !

Autant d’images saisissantes qui imposent une vision personnelle et une esthétique enveloppante au service d’un récit tout en symboles… Car « La cinquième saison » semble aussi bien s’orienter
vers une perspective écologique et environnementale (évocation des bouleversements climatiques liés à la pollution des hommes ?) que vers une description de la face la plus sombre de l’humanité,
lorsqu’elle voit le monde s’effondrer autour d’elle. L’éternel hiver que décrit le film signifie également la fin de toute vie et la chute de la civilisation, sombrant alors dans la barbarie. Si
la volonté de brûler « tonton hiver » pour faire revenir le printemps au début du film est un geste purement symbolique, la cérémonie finale revêt un caractère bien plus réel et cathartique : les
villageois y désignent un bouc émissaire à brûler pour de bon cette fois-ci !

Mais « La cinquième saison » ne doit pas s’enfermer dans une seule interprétation et se veut au contraire bien plus large que ce que tout analyste pourra en proposer… A dire vrai, le film joue
beaucoup sur les sensations du spectateur et relève alors de la sphère de l’intime, offrant à chacun de se faire sa propre « expérience » du film, se laissant absorber et envoûter par des visions
et des éléments qu’un autre n’aura pas forcément retenu… C’est exactement ce que veut dire Jessica Woodworth lorsqu’elle évoque son travail en le comparant à de la musique : "L’expérience de
l’écoute musicale est subjective et très personnelle. Nous aimerions que nos films soient reçus et ressentis comme s’ils étaient de la musique. Nous travaillons avec la musique très tôt, avant
même de tourner. Pour tout le domaine sonore ou musical, Michel Schöpping est notre partenaire de création depuis « Khadak ». Avec lui, nous avons exploré tous les champs du possible."
L’exploration des champs du possible : une très belle définition d’un long métrage mystérieux et singulier…































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