lundi 22 avril 2013

[Critique] Clip, de Maja Milos



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(Serbie, 2011)



Sortie le 17 avril 2013




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Même si elle ne va pas aussi loin visuellement que « A Serbian film », la
réalisatrice Maja Milos sait néanmoins demeurer percutante pour parler de la situation socio-politique de son pays avec son premier film « Clip »… A travers le quotidien de Jasna, une adolescente
de 16 ans évoluant dans un grand désarroi familial (la pauvreté, le père mourant…) et aux côtés d’une bande d’« amis » bien décérébrés, elle évoque la misère des habitants de la Serbie, la
lourdeur d’un certain machisme de plus en plus insidieux, mais aussi – et peut-être surtout ! – la déchéance de la jeunesse actuelle, amenée par une société de plus en plus consumériste et
matérialiste…

Malgré sa sécheresse documentaire et sa crudité réaliste, « Clip » excelle à montrer la perversion qu’a induit l’omniprésence technologique dans les rapports entre les êtres, notamment à travers
l’usage du téléphone portable par les plus jeunes. La réalisatrice explique que "l'idée de Clip [lui] est venue après avoir visionné beaucoup de clips vidéos sur internet faits par de très jeunes
filles, filmant des soirées sauvages, des plaisanteries en plein cours, des prises de drogues, des sextapes etc. Je me suis dit qu’il y avait quelque chose de très important qui se passait là,
dans cette façon de s’exprimer chez les jeunes. J’ai fait tout un travail de recherche en ayant déjà en tête l’idée que je voulais traiter ce sujet de manière très frontale". Et en effet, le film
saisit par sa « frontalité » et sa prise directe avec les jeunes, tous incarnés par des acteurs non-professionnels pour amplifier l’aspect « document » à l’image… L’éparpillement des points de
vue, notamment par l’utilisation à l’écran des films effectivement tournés par les jeunes, rajoute encore au réalisme…

Au fond, « Clip » accuse une société où le seul matérialisme a supplanté toute réflexion ou tout sentiment. La banalisation de la pornographie dans à peu près tout semble avoir pour effet cet
absence de pudeur de la part d’une jeunesse, qui est prête à se montrer et à se filmer dans à peu près toutes les positions et toutes les situations… comme s’il fallait se filmer avec son
portable pour donner une réalité à son corps ou à une relation sexuelle. Difficile, dans ces conditions, de parler alors d’amour : on reste glacé par la relation de l’héroïne avec son « petit ami
», qui abuse d’elle et la transforme en simple objet sexuel… C’est dans la volonté tenace de Jasna à se plier à toutes ses exigences que l’on comprend son amour pour lui. Quant à lui, sa froideur
et son machisme, hérités sans doute de ses jeux vidéos et de la représentation de la femme dans l’imagerie contemporaine, aura bien du mal à révéler ses sentiments, jusqu’à ce coup de sang final,
violence apparemment nécessaire pour réveiller un peu la nature de ses désirs ?































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