lundi 6 février 2012

[Critique] Detachment, de Tony Kaye



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Detachment, de Tony Kaye



(Etats-Unis, 2011)



Sotie le 1er février 2012



Note :
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A l’instar de la très réussie série télévisée « Boston Public » (créée par David E. Kelley), « Detachment » évoque l’état de délabrement scandaleux de l’enseignement public aux Etats-Unis, à
travers l’exemple d’un lycée jugé difficile, dans la mesure où y sont concentrés les cas sociaux et les élèves à problèmes… Comme dans la série précédemment citée, c’est par le prisme du regard
enseignant que l’intrigue est construite, en l’occurrence ici à travers le regard d’Henry Barthes, un professeur d’anglais remplaçant, à qui une vie assez rude a appris à demeurer « détaché » et
à distance des autres… Pourtant, les choses vont changer au contact d’une jeune prostituée qu’il prend sous son aile et d’une élève isolée qui semble s’attacher à lui…

Si l’histoire du jeune prof jeté parmi les loups d’une classe ingérable n’a rien de vraiment nouveau au cinéma, depuis « Graine de violence » de Richard Brooks jusqu’à « Entre les murs » de
Laurent Cantet (on s’abstiendra de se référer au piteux « Esprits rebelles » tout de même…), « Detachment » possède peut-être un ton plus moderne et cherche à aller un peu plus loin dans la
noirceur, quitte à charger un peu son discours, en présentant notamment un corps enseignant résigné et désespéré, qui se contente désormais de contempler l’étendu des dégâts… L’occasion entre
autre de retrouver l’excellente Lucy Liu comme conseillère pédagogique dans une scène de pétage de plomb excellente devant une élève paumée et entêtée, qui ne comprend toujours pas que l’on
cherche à l’aider à s’en sortir…

Même si le film s’achève sur un semi-« happy end », on peut dire qu’il cherche cependant globalement à présenter des profs plutôt au bord du gouffre, tous prêts à jeter l’éponge face à des élèves
complètement lobotomisés par une société qui les tue à petit feu sans qu’ils ne s’en rendent compte… En dehors d’une scène de cours où le jeune prof paraît les captiver en leur expliquant
l’intérêt d’apprendre et de penser par soi-même, le tableau dressé reste ainsi aussi noir que celui que l’on trouve en classe. Ce pessimisme souvent appuyé jusqu’à l’exagération est marqué par la
mise en scène assez typique du réalisateur de « American History X » Tony Kaye : montage abrupt, univers sale, effets visuels ou sonores violents…

Si le tout se révèle ainsi un peu poussif, notamment à cause d’un enchaînement de situations extrêmes chargeant probablement trop la mule (ou plutôt le mulet Adrien Brody, par ailleurs impeccable
!), il faut reconnaître que « Detachment » se regarde plutôt bien et sait faire preuve d’une impressionnante efficacité, aussi bien formelle qu’idéologique… En effet, en laissant évoluer son
personnage principal entre l’univers d’un lycée où jeunesse se passe (mal) et une maison de retraite où son grand-père s’apprête à achever misérablement sa vie, le film assène une vérité
fondamentale sur toute civilisation : une société qui néglige à ce point les deux piliers fondamentaux que sont l’éducation et la santé de sa population est une société qui ne peut que se diriger
droit dans le mur… et rien que pour ça, on peut dire que le cinéma de Tony Kaye, même s’il use de grosses ficelles, délivre un message d’urgence limpide et utile !































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6 commentaires:

  1. Quelques grosses ficelles misérabilistes mais de beaux moments de poésie et un personnage principal attachant dans sa relation avec la jeune prostituée. 

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  2. Je l'ai trouvé fantastique ce film. Il est certes plombant mais tellement chargé d'émotions ! Et puis Brody est mille fois mieux que Clooney dans The Descendants (aucun rapport, mais j'avais
    envie de le dire ;-))

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  3. Ah non toutes ces grosses ficelles et cette absence de finesse c'est lourd, lourd, lourd. J'ai pas accroché du tout.

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  4. Il y a un truc que je ne comprends pas: pourquoi je lis à gauche à droite que ça se passe dans un lycée difficile ou que le prof a affaire à une classe ingérable? Parce que si j'ai bien compris,
    ce film se déroule dans un lycée plutôt bien situé et reconnu (on veut même en augmenter la cote, et la directrice au début demande au prof pourquoi il est allé avant dans des lycées de la
    zone...). Et la classe à laquelle a affaire le professeur est normale, dans le sens qu'elle ressemble à la plupart des classes que j'ai pu avoir, coups d'éclats compris. Or je n'ai jamais
    enseigné dans des écoles dites difficiles...

    Ce film n'est pas pessimiste. Il est simplement réaliste. Il représente la réalité du métier de prof telle que je la connais et la pratique. C'est la première fois que le cinéma me montre enfin
    un miroir de celle qui ne va plus être ma profession pour longtemps...

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  5. Du niveau de l'enseignement? Pas du tout, bien au contraire, c'est comme ça que ça se passe, y compris pour les parents qui viennent piquer des beuglantes sur les profs quand on punit leur gosse.
    Et je dois même dire que le truc du prof qui s'accroche à la grille m'a émue, parce que c'est vraiment ça, à un moment, tu deviens juste invisible. Fini les élèves qui te laissent passer parce
    que tu es prof. Tu te fonds dans leur masse maintenant...


    Idem pour les homes. Ma grand-mère est dans un home, un home assez cher en plus. Eh bien c'est exactement (exactement) comme dans le film. Même indifférence, même je m'en foutisme. Je rêve de
    pouvoir un jour avoir le courage de pousser le coup de gueule que le personnage pousse à une infirmière...

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  6. rah la la, la triste vie des profs... j'ai bien fait de ne pas insister, à l'époque du capes ! :)

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