lundi 9 janvier 2012

[Critique] Oslo, 31 août, de Joachim Trier


oslo_31_aout.jpgOslo, 31 août, de Joachim
Trier



(Norvège, 2011)



Sortie le 29 février 2012



Note :
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Tout commence par une balade solitaire en forêt… et puis une tentative de suicide ratée à la Virginia Woolf, au beau milieu d’une nature romantique : un jeune homme regarde l’onde comme s’il
voulait y plonger, puis s’enfonce doucement dans le lac, armé d’une lourde pierre contre le corps… Il coulera et refera surface, essoufflé. Trempé, il rentre au centre de désintoxication où il
termine mornement sa cure… Dès les premiers plans, « Oslo, 31 août » transpire un style atypique et hypnotique, tout à la fois beau et tragique, poétique et contemplatif, duquel on ne ressortira
certainement pas indemne…

Ce second long métrage de Joachim Trier (après « Nouvelle donne » sorti en 2008) raconte l’errance dans Oslo d’Anders, ce jeune toxico autorisé à sortir pour une journée du centre où il a presque
terminé sa cure de désintoxication… Il doit passer un entretien d’embauche, mais va surtout en profiter pour revoir sa famille et ses amis, tous ces proches auprès desquels il pourra peut-être
trouver une deuxième chance… Après une vie gâchée par la drogue, parviendra-t-il, ou plus précisément « voudra-t-il » tenter ce nouveau départ que la vie lui offre ?

Avec une grâce intime et précieuse, « Oslo, 31 août » se révèle sur la longueur, avec sa mise en scène douce et lente, oslo 31 aoutqui agit comme une élégie tendre et fascinante sur la fragilité humaine… Le réalisateur sait se faire discret pour isoler son personnage dans des décors urbains protéiformes,
dans lesquels il erre comme dans les méandres de sa propre intériorité. On le sent aussi à l’écoute des autres, à travers des scènes absolument remarquables et fascinantes où il observe les
habitants anonymes d’Oslo, dont on entend des fragments d’idées, dont on vit des parcelles d’existence… Anders cherche sa place dans ce monde, mais sait qu’il ne pourrait se contenter d’une vie «
normale » : la longue conversation qu’il a avec son meilleur ami, désormais marié avec enfants, possède une justesse infinie et révèle une vérité des âmes sublime… Son ami semble lui-même étonné
et désespéré de la vie qu’il mène, quand Anders finit par lui décrire finalement ce vers quoi il tend désormais, et ce vers quoi il nous mènera surtout jusqu’à la fin du film… Evoquer la mort
avec un calme impressionnant et une atonie déchirante : le long métrage trouble au moins autant qu’il sidère et envoûte…

Joachim Trier parvient à nous parler de la vie elle-même avec une mélancolie bouleversante, à travers le regard de ce jeune homme déchu qui n’aspire plus à rien et qui choisit de ne plus
participer à l’absurdité de ce monde… Malgré l’espoir d’une nouvelle vie qui se dessine au fur et à mesure de ses pérégrinations à travers la ville, il va pourtant volontairement tout détruire :
il quitte son entretien d’embauche alors même qu’il avait si bien commencé, il se détourne peu à peu de ses amis, ou même de cette belle inconnue qu’il vient de rencontrer, promesse d’une belle
relation… Mais Anders pense à une autre fille, vestige désormais muet de sa vie révolue… A quoi bon recommencer tout ça lorsque l’on se sent déjà usé par la vie à 30 ans, lorsque l’on ne trouve
plus de sens à rien… Pour incarner le personnage principal, l’acteur Anders Danielsen Lie irradie l’écran de sa douceur triste et de son charme ambigu, masque d’une faille profonde… Le monde et
les gens semblent désormais passer sur lui sans que plus rien ne se passe en lui : voici le touchant portrait d’une jeunesse à la dérive…































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6 commentaires:

  1. C'est marrant, je suis passé totalement à côté du film. Pour moi il est bancal, manque de rythme et je me suis finalement ennuyé. Pourtant quand je lis ta chronique je comprends, mais n'ai pas
    ressenti tout ça...

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  2. Voilà un film que j'ai trouvé époustouflant. La mise en scène est intelligente, le personnage d'Anders est magnifiquement incarné et la tristesse sourde du film est touchante au possible. Le film
    que j'ai préféré en ce début d'année.

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  3. Excellente analyse, que je partage totalement! bravo!

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  4. La caméra est collée à Anders, et nous aussi. Toute promesse de rédemption est vouée à l'échec : la tentative de suicide "romantique" ratée du début du film nous prépare à l'overdose finale, en
    fait suicide assumé. Anders traîne sa solitude infinie à Oslo le temps d'une journée et d'une nuit sans fin où il cherche à revoir (une dernière fois) amis et famille pour les graver dans sa
    mémoire avant de les quitter à jamais. Même l'ébauche d'une rencontre avec une jeune femme ne peut le retenir du côté de la vie. C'est d'une tristesse absolue mais magnifiquement filmée.

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  5. oh, tu en parles très bien chère fourmi ! content que ça t'ait plu, c'est vraiment un des premiers grands films marquant de cette année...

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