lundi 16 janvier 2012

[Critique] Les nouveaux chiens de garde, de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat



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Les
nouveaux chiens de garde, de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat



(France, 2011)



Sortie le 11 janvier 2012



Note :
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Attention : Film d'utilité publique !

Voilà typiquement le genre de film documentaire que vous risquez de ne pas pouvoir voir ailleurs que dans un réseau de salles de cinéma indépendant lors de sa sortie en salles ou plus tard sur un
DVD édité par un obscur distributeur vidéo… Car « Les nouveaux chiens de garde » a de quoi largement déstabiliser les riches puissances économiques qui détiennent également les rennes du pouvoir
et de l’information : le film de Gilles Balbastre et Yannick Kergoat ne passera ainsi certainement jamais à la télévision française… Raison de plus de courir le voir en salles dès aujourd’hui
!

Lorsqu’un sauveur de la démocratie comme l’ami Pierre Carles (véritable Cassandre contemporain que malheureusement personne n’écoute ou ne peut écouter tant sa voix est constamment étouffée par
le grand vacarme médiatique) parvient à faire des émules, cela donne ces « Nouveaux chiens de garde », véritable critique des médias à la fois documentée et pamphlétaire, qui trouve tout autant
ses sources dans le passé (un ouvrage de Paul Nizan, « Les chiens de garde », critiquait déjà en 1932 les gentils philosophes et écrivains comme des gardiens de l’ordre établi par la classe
dominante) que dans le présent (revoir le génial « Fin de concession » signé
Pierre Carles
).

Dans le générique de fin du film apparaissent des extraits critiques par les médias dominants du livre de Serge Halimi paru en 1997 et sur lequel s’appuie « Les nouveaux chiens de garde » :
autant d’injures qui démontrent la peur panique de journalistes à qui l’on renvoie la déplaisante vérité de l’hypocrisie et du danger pour la démocratie que fait courir leur façon de travailler…
Aujourd’hui, ce sont les mêmes qui critiqueront le film en prétendant notamment qu’il ne laisse pas de voix à la contradiction : sauf que c’est justement la voix que porte le documentaire que
l’on n’entend jamais nulle part dans les gros médias, à la solde des groupes économiques puissants pour qui ils travaillent… Ne peut-on d’ailleurs pas lire dans la critique du « Monde » : « Montage d'archives, témoignages à
charge et discours-maître en voix off constituent une structure peu favorable, en effet, à l'expression du pluralisme des opinions et de la complexité du réel. Le mélange entre la charge
polémique et la pensée argumentée brouille par ailleurs la donne, ce qui s'avère justifié dans une catégorie ne l'étant pas nécessairement pour l'autre. La politique de l'extrait choisi
d'archives, associée à la stigmatisation individuelle de personnes auxquelles on n'accorde pas le moindre droit de réponse, sont à ce titre des procédés contestables. » Limite si le film n’est
finalement pas qualifié de « dangereux » pour l’opinion…

Pourtant, « Les nouveaux chiens de garde » doit bel et bien être considéré, plus que jamais, comme une contradiction salvatrice du monde des médias actuel, qui démontre avec une conviction
sincère, une ironie à frémir et de nombreux exemples pertinents que l’information diffusée aujourd’hui au plus grand nombre est de plus en plus éloignée du pluralisme, de l’objectivité et de
l’indépendance qu’elle prétend incarner, justement parce qu’elle est détenue par quelques privilégiés à la tête de grands groupes industriels et financiers entretenant une connivence malsaine
avec le pouvoir… Les journalistes travaillant pour ces groupes ne sont alors plus que les laquais d’un pouvoir vendu au grand Capital, restituant mot pour mot la parole des puissants, qu’ils
tutoient en coulisses ou avec qui ils pavoisent aux très selects dîners du « Siècle », « club » fermé réunissant les membres les plus puissants et influents de la classe dirigeante française
(politiques, patrons, journalistes, universitaires…)

Si seulement une poignée de journalistes sont ici pris en exemple faute de temps (David Pujadas, qui avait d’ailleurs reçu la « laisse d’or » du meilleur toutou dans le
film de Pierre Carles
, Isabelle Giordano, Christine Ockrent…), on ne perd cependant pas de vue que tous ceux qui prétendent nous informer avec déontologie et indépendance sont à mettre dans
le même sac ! Et lorsque l’un d’eux se révèlent être un peu impertinent, il n’a alors plus que deux options : disparaître hors du système dominant ou être intégré par lui… Le parcours d’un Michel
Field, passant de la lutte révolutionnaire dans les années 70 à la présentation d’un meeting UMP dans les années 2000, est à ce titre exemplaire ! Et en réponse à ceux qui prétendent que le
principe de concurrence à l’heure de la multiplication des stations de radio et des chaînes de télévision est le garant de l’indépendance de l’information, « Les nouveaux chiens de garde »
s’interroge sur cette capacité des journalistes à passer d’un média à l’autre, d’un service public à un service privé (et inversement), comme des pions équivalents interchangeables, sans que cela
pose la moindre question de déontologie… Au point qu’à la fin du film, alors que l’on nous appelle au réveil démocratique et citoyen, on se demande bien désormais auprès de qui on peut encore
s’informer sans risque pour la conscience aujourd’hui !



 



Le site internet du film "Les nouveaux chiens de garde"



Retrouvez l'article de Phil Siné sur le site Le Plus du
NouvelObs !
































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2 commentaires:

  1. Bonjour Phil, hier soir en bravant le froid parisien, je suis enfin allée voir ce documentaire. Je ne le regrette pas. Ce pamphlet très subjectif et de parti pris m'a mise en joie. Il dure 1h40,
    J'aurais aimé qu'il dure plus. Il rencontre un certain succès et j'en suis contente. Ce qui est inquiétant c'est ce qu'il démontre. Pire que Berlusconi et Fox News réunis. Edifiant. Bonne
    journée.

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  2. je suis content que tu l'ai vu ! si tu veux poursuivre dans le genre, tu peux essayer "fin de concession" ou la plupart des films de pierre carles ! (mais tu connais peut-etre déjà...)

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