dimanche 9 octobre 2011

[Critique] Edmond, de Stuart Gordon


jour du saigneuredmond



Edmond, de Stuart Gordon (Etats-Unis, 2005)



Note :
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Quittant l’univers du fantastique pur, Stuart Gordon revient en grande forme en abordant l’horreur sous un angle beaucoup plus réaliste, auquel il adjoint même des perspectives sociales aussi
surprenantes que passionnantes… Dans « Edmond », il filme l’itinéraire d’un « looser magnifique », poussé à des actes extrêmes à cause d’une société corrompue et décadente…

Edmond, interprété par l’excellent William H. Macy, remet toute sa vie en question en sortant de chez une voyante qui lui a simplement dit qu’il n’était pas à sa place… Quittant alors
unilatéralement femme et boulot, il va s’acharner à enfin trouver sa place en sombrant peu à peu dans les bas-fonds urbains. Stuart Gordon met en scène sa « descente aux enfers » avec une
noirceur extrême, montrant avec une acuité symbolique la transformation terrifiante de cet homme médiocre et rangé, docile et soumis aux lois du jeu social, en un incroyable bourreau sanguinaire,
trouvant sa libération dans la rébellion ultime… En décrivant le personnage d’Edmond, le cinéaste démontre finalement comment les frustrations et la violence de la société peuvent transformer un
agneau transi en loup psychopathe !

Une fois libéré de ses oripeaux sociaux, Edmond va d’abord vouloir se vautrer dans les plaisirs du sexe (on reste après tout dans le cinéma de Gordon, où la libido a toujours eu une aura bien
palpable). Mais quelle déception quand il s’aperçoit que l’univers de la prostitution n’est basé que sur l’arnaque des pauvres hères comme lui… Quand il se retrouve malmené et dépouillé par deux
petits truands des rues, il semble considérer que trop c’est trop et entame une impressionnante odyssée sanglante, afin de nettoyer un peu au couteau de boucher ce monde dégueulasse et perverti…
En côtoyant la lie de l’urbanité, Edmond fait défiler à l’écran les pires individus qui rendent la nuit encore plus sinistre dans les ruelles crasses des Sodomes et Gomorrhes modernes, et en
voulant éradiquer toute cette pourriture, il se met paradoxalement à en faire partie lui-même… Le film trouve un climax hallucinant dans une rame de métro, lorsque Edmond terrorise une femme à la
vue de tous et que personne n’ose intervenir, pétri par la peur ou l’indifférence de la ville souterraine. « Edmond » devient alors une métaphore puissante et implacable de l’annihilation
constante de l’humanité dans les grandes métropoles, où le crime domine et l’horreur se banalise…

Même si la (courte) durée du film et son budget limité tendent à réduire l’impact d’« Edmond », sa portée idéologique n’en demeure pas moins forte. On reste en outre assez songeur devant une fin
inattendue et presque « apaisée », alors même que le personnage a perdu sa liberté et demeure humilié par un homme noir avec qui il partage sa cellule en prison : une étonnante dérive « gay
friendly » ouvre le film – et le personnage d’Edmond, jusque-là raciste et homophobe – vers un sentimentalisme presque humain… Edmond aurait-il enfin trouvé sa place ?



 



Mise en perspective :



- Stuck, de Stuart Gordon



 



Au cours des précédents jours du Saigneur































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2 commentaires:

  1. Je ne connaissois pas cet objet filmique!???? Merci Saigneur!!!

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  2. Un film fort, qui n'est pas sans faire penser à Taxi Driver. William H. Macy est comme tu le dis énorme dans son rôle de looser.

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