jeudi 2 juin 2011

[Critique] Une séparation, d’Asghar Farhadi



une separation



Une séparation, d’Asghar Farhadi (Iran, 2010)



Sortie le 8 juin 2011



Note :
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Après le superbe « A propos d’Elly », le cinéaste Asghar Farhadi continue de sonder la vie et les mœurs de la société iranienne avec « Une séparation », récit d’un homme quitté par sa femme, qui
engage une autre femme pour s’occuper de son vieux père malade. Mais cette femme est enceinte, un incident advient, son mari intervient, puis la justice… et les évènements s’enchaînent ainsi sans
le moindre temps morts, toujours au rythme d’une mise en scène saccadée et instinctive, et au gré d’une caméra très mobile, qui nous plonge au cœur de l’action et au plus près des individus.

Ours d’or au dernier Festival de Berlin, le film y a également raflé plusieurs prix d’interprétation, que les acteurs n’ont d’ailleurs pas volé, tant leurs personnages sont superbement incarnés !
On sent les profondeurs poindre en chaque être, à travers un mot, un geste, une hésitation… Le cinéaste iranien nous donne à voir des hommes et des femmes complexes et surtout avant tout humains
: il peut y avoir de mauvais actes, mais jamais de mauvaises personnes… Tout n’est pas blanc ou noir et chaque personnage n’est ni imbuvable ni irréprochable, ce qui rend le film plutôt subtil et
intéressant !

Le scénario procède lui aussi à une construction complexe : les situations s’enchaînent et éclatent la narration dans de nombreuses directions, laissant le spectateur se rattacher à ce qu’il juge
le plus important. On voit des hommes s’emporter, puis le regretter. On voit des femmes qui agissent, contrairement à l’image de la condition des femmes iraniennes que l’on peut parfois se faire,
mais des femmes aussi qui cherchent à discuter et à tempérer des situations parfois inextricables. Car au fond, le film nous parle surtout de ça : de personnages empêtrés et immobilisés dans un
quotidien rendu pesant par tout un ensemble de lois souvent plus contraignantes que réellement nécessaires ou morales, qu’elles soient religieuses, coutumières ou sociétales (on y voit notamment
une description parfois ironique du système judiciaire local). Asghar Farhadi fait en cela œuvre éminemment politique, même s’il prétend avoir voulu faire un film universel, qui interroge et
laisse chacun se faire ses idées : « Selon moi, ce qui caractérise également cette histoire, c’est qu’elle n’a pas été conçue de façon unilatérale ou caricaturale. Autrement dit, elle permet aux
spectateurs d’entrer dans l’histoire par différents biais, en fonction de leur sensibilité, et d’en tirer leur propre interprétation. Par exemple, en Iran, plusieurs spectateurs ont vu ce film
comme un film politique. D’autres spectateurs, au contraire, m’ont dit que c’était un film sur l’éthique des relations humaines. D’autres encore l’ont perçu comme un drame humain. J’en suis ravi
car quand j’ai commencé à écrire ce film, je voulais vraiment que chacun puisse avoir un regard et un point de vue personnel sur l’histoire ».

Mais « Une séparation » reste aussi, en filigrane, le récit d’une séparation, justement… On retiendra d’ailleurs assez facilement les deux plans séquences qui ouvrent et qui ferment le film :
dans le premier, le mari et la femme sont encore côte à côte pour demander le divorce (le refus du juge lance d’ailleurs quasiment le film sur un registre de comédie) ; dans le dernier, ils sont
chacun opposés l’un à l’autre, séparés par une vitre, et ne se parlent plus du tout, achevant le récit dans le drame, non sans une certaine tristesse… Les émotions fusent, ainsi, à la vue de
cette très réussie « Séparation » !



 



Mise en perspective :



- Gagnez des places de ciné pour aller voir "Une
séparation"































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6 commentaires:

  1. Je n'ai lu qu'en travers ta critique.


    Une de mes prochaines séances ciné !

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  2. La mise en scène est remarquable, en effet. C'est du très bon cinéma, et son succès relatif est tout à fait mérité.

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  3. Eh bien perso, je répondrais à Farhadi que j'ai vu son film comme politique, comme une réflexion sur l'éthique des relations humaine (et sur la complexité de l'Homme en général) et comme un drame
    humain ! Ton rapprochement sur les deux plans d'intro et de conclusion est très juste, même si on sent déjà dans ce premier plan cadré de manière parfaitement centrée comme une ligne imaginaire
    qui sépare déjà les deux être, mais qui ne deviendra réelle que dans le dernier plan où la symétrie des contraires est magnifique.

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  4. Très subtile allégorie politique cryptée. Film magnifique qui est construit comme une double parenthèse, une alliance brisée.

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  5. Film vu hier grâce à toi et la VOD.


    Je ne sais pas je ne m'attendais pas à cette histoire mais j'ai beaucoup aimé c'est très bien traité.


    Il me reste à faire un billet sur mon blog.


    Bises et encore merci.

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  6. content que ça t'ait plu !! :)

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