mercredi 22 juin 2011

[Critique] La balade sauvage (Badlands), de Terrence Malick



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La balade sauvage (Badlands), de Terrence Malick (Etats-Unis, 1974)



Note :
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Premier film de Terrence Malick, « La balade sauvage » s’avère passionnant en ce qu’il contient déjà en germe toutes les obsessions et le style qui deviendront l’essence même du cinéma malickien,
exalté dès le chef d’œuvre qui suivra : « Les moissons du ciel ».
D’emblée on est ainsi porté par la voix off d’un personnage, qui en plus de raconter l’histoire propose surtout une évocation poétique de l’intimité de cette personne… On retrouve bien sûr aussi
le lyrisme de la mise en scène du cinéaste, à travers essentiellement une façon toute particulière de montrer la nature, et la façon dont les hommes peuvent s’intégrer merveilleusement à elle… La
caméra s’arrête ici et là pour nous montrer des décors faits de forêts, de champs, de fleuves ou de terre à perte de vue, ou encore les animaux qui y évoluent, jusqu’aux insectes à même le sol.
Les personnages tâchent de se débrouiller dans leur environnement, construisant des cabanes dans les arbres ou pêchant tant bien que mal dans la rivière… Déjà dans le premier plan du film, on
s’amusait à voir la jeune narratrice se vautrer sur son lit avec son chien, jouant sensuellement avec lui, comme dans une communion amoureuse avec l’animal, et par là même avec la nature
entière…

Pourtant, la contemplation panthéiste reste discrète dans un univers marqué par les préoccupations d’un cinéma encore en grande partie « classique ». L’histoire reste notamment au cœur de cette «
Balade sauvage » et demeure racontée de façon assez conventionnelle. Elle n’en est cependant pas moins passionnante : s’inspirant d’un fait divers réel, le film suit l’odyssée tragique de deux
jeunes gens amoureux, qui empêchés de s’aimer par le père de la jeune fille s’enfuiront en laissant quelques cadavres sur la route. Le road movie est lancé et au fur et à mesure que le récit
avance, le jeune homme révèle une nature de psychopathe, tuant tous ceux qui passent devant sa gâchette… Si l’on peut y voir une confrontation de classe (le jeune homme est éboueur et la jeune
fille issue d’un milieu plutôt bourgeois), « La balade sauvage » semble pourtant avant tout montrer les affres de la folie amoureuse : une plongée dans une passion empêchée, qui ne peut que se
terminer dans le sang…

Les acteurs qui incarnent le couple, tous les deux débutants, sont incroyablement intenses et beaux ! Sissy Spacek, avant de faire voler les objets à distance dans « Carrie », se révèle ici 
touchante de naïveté et de fragilité… Quant à Martin Sheen, il impose l’image perverse d’un psychopathe au charme fougueux et redoutable : plusieurs fois comparé à James Dean dans le film, il
finit toujours par paraître sympathique malgré ses crimes, même aux policiers qui l’arrêtent à la fin de leur voyage meurtrier… Troublante ambiguïté ! On reste quand même rudement émerveillé par
leurs talents réunis, par celui d’esthète de Malick et on retient ce sublime mouvement d’élévation final, lorsque le couple est embarqué dans un avion par la police… Dernier plan comme une
ascension, malgré la déchéance des héros, comme s’ils méritaient quand même de gagner le ciel, touchés par la « grâce » de leur amour pur : le soleil, les nuages, et déjà une belle vision de Dieu
au sein même du monde qui nous entoure…



 



Mise en perspective :



- Les moissons du ciel, de Terrence Malick (Etats-Unis, 1979)



- Le nouveau monde, de Terrence Malick



- The tree of life, de Terrence Malick (Etats-Unis, 2011)































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7 commentaires:

  1. Le meilleur film de Malick (après les moissons ?) avant qu'il ne se laisse déborder par son délire contemplatif sentencieux.

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  2. J'irai le voir dans la semaine si j'ai le temps :)

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  3. Très envie de le voir celui ci. Il m'a l'air vraiment intéréssant, surtout voir Malick traité un personnage de psychopathe.

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  4. Ca faisait 12 ans que je ne l'avais pas vu, et je l'ai revu la smaine dernière avec la grande salle de l'Arlequin presque pour moi seul, c'était une projection fantastique.

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  5. C'est vrai que le Linder n'est pasle cinéma le plus fréquenté de Paris. Même quand ils y diffusaient le Festival de Films Chinois de Paris, il y avait laaaargement assez de place pour tout le
    monde. La seule fois où je l'ai vu plein à craquer, c'était pour un film indien en exclusivité.

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  6. C'est vrai, on reconnaît bien Malick dans son premier film. Déjà il contemple l'amour et la violence que contiennent l’âme humaine et la nature dans son ensemble. Avec un regard de cinéaste
    unique qui donne à chaque détail du quotidien sa part de grandeur mystique. Ma critique :
    http://tedsifflera3fois.com/2011/12/06/la-balade-sauvage-critique/

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  7. oui, les germes d'une grande oeuvre à venir...

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