vendredi 29 avril 2011

[Critique DVD] Opening night, de John Cassavetes



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Opening night, de John Cassavetes (Etats-Unis, 1978)



Sortie DVD le 6 avril 2011 chez Ocean Films



Note :
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Célèbre comédienne, Myrtle Gordon répète une nouvelle pièce avec toute son équipe habituelle, dont la Première doit avoir lieu quelques jours plus tard. Un soir en sortant du théâtre, elle est
cependant abordée par Nancy, une jeune fan hystérique : après lui avoir signé un autographe, elle la voit mourir, renversée par une voiture, depuis le siège arrière de l’automobile qui la conduit
au restaurant, elle et une partie de sa troupe… Cet évènement déstabilisant va bouleverser sa façon d’envisager son travail, mais aussi sa vie toute entière, au point de basculer dans une forme
de folie presque autistique…

Avec « Opening Night », John Cassavetes signe un film emblématique du « style » qui a forgé sa réputation de cinéaste indépendant, travaillant à mille lieues des studios et des compromissions
artistiques qu’ils exigent. On peut d’ailleurs considérer ce long métrage comme l’aboutissement de sa manière de travailler, venant après « Faces » ou « Une femme sous influence », et juste avant
« Gloria », son unique concession au système hollywoodien… Il faut dire qu’«
Opening Night », comme tous ses films expérimentaux précédents, ne lui rapportent pas le moindre centime et ont même plutôt tendance à l’endetter un peu plus encore à chaque fois : « Gloria » deviendra par la suite son seul succès public, mais aussi son film le plus «
conventionnel » et « narratif »… La mise en scène d’« Opening Night » se révèle ainsi l’étape ultime d’un procédé de tournage unique et révolutionnaire : avec une caméra flottante, laissant durer
les plans et se permettant de filmer les acteurs au plus près, notamment à travers des gros plans des visages qui sont un peu comme la « marque » du cinéaste, le film donne souvent l’impression
d’une improvisation constante (alors que le script était parait-il au contraire très écrit), d’un cinéma sur le fil, comme en déséquilibre, qui lui procure finalement une sensation de réel et de
vérité troublante et absolument admirable !

Mais ce cinéma de « procédé », dont « Opening night », avec « Une femme sous influence », sont probablement les chefs-d’œuvre, donne aussi l’occasion à Cassavetes d’offrir à sa femme et à sa
muse, la sublime Gena Rowlands, des rôles à sa démesure ! Placée ici au cœur d’une magistrale mise en abyme (une scène de théâtre au sein même d’un dispositif cinématographique), l’actrice
mythique donne tout ce qu’elle a pour incarner à l’écran un personnage de femme sur le déclin absolument magnifique et bouleversant… Tout au long des 2h20 que dure le film, elle « est »
littéralement Myrtle, cette comédienne troublante et touchante, portée sur la bouteille et perturbée à l’idée de voir s’éteindre doucement le feu des projecteurs, elle qui a tout donné pour son
métier, au détriment d’un mari et d’enfants… La mort brutale de sa jeune admiratrice, et les hallucinations qu’elle a d’elle par la suite, la pousse à se battre pour remettre en question les
thèmes trop sombres et pessimistes de « Second woman », la pièce de théâtre qu’elle s’apprête à jouer : elle ne veut pas être cette « deuxième femme », cette femme de l’ombre que l’on va finir
par oublier… Par son inconstance et sa fantaisie, au risque de transformer la représentation en four, elle parviendra alors de justesse à réenchanter la pièce, à la rendre un peu plus drôle et
surtout porteuse de l’espoir qui lui manque cruellement. C’est paradoxalement en arrivant complètement ivre le soir de la Première (moment clé du film, contenu dans son titre même, « Opening
night » désignant la première représentation d’un spectacle), en utilisant la substance qui la détruit (l’alcool) que le personnage parvient à se sauver aux yeux du public et à obtenir un énorme
succès : le film s’impose alors comme une réflexion subtile et complexe sur l’art et la solitude de l’artiste… Jusqu’au-boutiste, Gena Rowlands fusionne encore une fois avec Myrtle, en se rendant
véritablement ivre pour interpréter la scène : l’art et le réel se mélange dans une confondante représentation… Remarquable, inimitable et inoubliable !



 



Bonus DVD : Présentation du film par Patrick "Cinéma de minuit" Brion - Le film vu par Xavier Durringer - Bande-annonce originale (pas moins de 5 minutes !) - Biofilmographies
très complètes



 



Mise en perspective :



- Gloria, de John Cassavetes (Etats-Unis, 1980)



 



Opening Night



Un DVD distribué par Ocean Films



Date de sortie : 6/04/2011



 



Autour du théâtre...



 



Critique réalisée en partenariat avec
cinetrafic































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2 commentaires:

  1. J'adore Cassavetes et Rowlands. Opening nights est un petit bijou. Je te conseille également Love streams, si tu ne l'as pas vu : c'est un de
    mes préférés :)

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  2. Oui c'est pas le plus connu de Cassavetes (qui tend d'ailleurs à être oublié, malheureusement). Son titre en français est "Torrents d'amour" mais je l'aime moins
    que le titre original.

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