jeudi 3 mars 2011

[Critique] Toi, moi, les autres, d’Audrey Estrougo



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Toi, moi, les autres, d’Audrey Estrougo (France, 2011)



Sortie le 23 février 2011



Note :
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Gabriel est un jeune con de bourge arrogant du 16e, sur le point de se marier à Alexandra, qui va voir sa vie basculer en tombant amoureux de Leila, la pauvre petite française à la mère décédée
et au papa immigré, qui galère à travailler pour pouvoir finir ses études… A travers leur amour, on assiste bien sûr à un choc entre deux mondes socialement opposés : une bourgeoisie « prout
prout » et une masse populaire laborieuse mais colorée… Le tout mis en musique, puisque l’on est dans une comédie musicale pétillante, où l’on chante sur des grands standards de la variété
française. C’est un peu « Romeo et Juliette » au pays de la « Star academy », ou « West Side Story » au temps des expulsions de sans papiers…

Car le contexte social de « Toi, moi, les autres » est assez amplement développé à l’image, de façon presque ostentatoire et trop appuyée (notamment quand des images d’archives viennent se mêler
inutilement à la fiction…) En parallèle de l’histoire d’amour, on suit ainsi les malheurs d’une amie de Leila, travailleuse sans papier, qui est sur le point de se faire expulser avec sa petite
fille… Alors entre son papa préfet de police qui applique la loi à la lettre et considère des humains comme des « dossiers » et les amis de Leila prêts à se rebeller, Gabriel ne tarde pas à
choisir son camp pour franchir la ligne et passer du « bon côté » ! Alors bien sûr, c’est caricatural et grossier, mais ça a au moins le mérite d’asséner ses idées sans ambiguïté… et on sent qui
plus est derrière tout ça une émulation profondément sincère !

La sincérité, la fraîcheur : voilà sans doute d’ailleurs ce qui caractérise le mieux ce très joli film, à la fois charmant et touchant… Si le scénario égrène quelques maladresses et si les
séquences musicales ne sont pas toujours bien réalisées (une mise en scène plus ample et un montage plus vif auraient sans doute aidé), on retrouve quand même dans « Toi, moi, les autres »
d’incroyables moments de grâce… On pense par exemple à certaines scènes dansées dans la rue (quand Alexandra suit Gabriel et Leila) ou même à cette première scène « en chanté » à l’hôpital, au
cours de laquelle Gab nous invite « pour un flirt avec [lui] » : qu’est-ce qu’on aimerait pouvoir lui dire oui ! D’autres scènes savent se faire moins rigolotes mais beaucoup plus poignantes,
lorsque le drame sociale reprend le dessus : de beaux travellings sur des douleurs intérieures invisibles d’un peuple sur « Sauver l’amour » (Balavoine) ou encore ces femmes en prison qui
chantent « Un autre monde » de Téléphone avec leurs voix déchirantes… C’est à pleurer !

Ainsi, le film d’Audrey Estrougo n’a pas toujours la subtilité des grandes comédies musicales, qu’il s’agisse de la maîtrise d’esthète d’un Jacques Demy ou de la magie du charme nonchalant d’un
Christophe Honoré qui signe « Les chansons d’amour », mais les lourdeurs de son récit et ses convictions scandées au mégaphone finissent paradoxalement par le servir pleinement. Ils lui
permettent en effet de s’inscrire dans une forme de « suréalité », un au-delà du réel un peu poussif qui ne fait finalement que nous rappeler que nous sommes au cinéma, dans une comédie musicale
qui plus est, qui doit faire renaître en nous autant de songes et de rêveries fantasmées et désirables… Et la vie est encore bien plus belle lorsqu’on la v(o)it en compagnie d’autant d’acteurs
aux charmes délicieux : Leïla Bekhti et Benjamin Siksou pour les rôles principaux… Sans compter que même les seconds rôles sont parfaits : Chantal Lauby, Jérémie Elkaïm et tous « les autres » !































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5 commentaires:

  1. Qui eut cru que derrière une affiche pareille se cachait un bon film! (oui, parce que bon, "never judge a book" toussa, mais quand même)


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  2. La comédie musicale française en 2011 : voilà un pari complètement fou à faire regimber plus d'un producteur. On peut donc saluer l'opiniâtreté de la réalisatrice. Plus dangereuse encore est la
    comédie musicale sociale. On se souvient du succès mitigé de "Jeanne et le garçon formidable" qui mettait tout de même en tête d'affiche Virginie Ledoyen et Mathieu Demy. La niaiserie était aux
    aguets. De quoi réfreiner les envies d'aller voir ce "Toi, moi, et les autres" et tout ceux qui le veulent... un mix entre "Les chansons d'amour" (l'interprétation par les acteurs) et "on connaît
    la chanson" (pour l'utilisation d'un répertoire existant) qui nous emmènerait aux limites de la Nouvelle Star (Siksou) ? Faut voir.

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  3. J'attends la fin des vacances pour voir ça tranquille sans trop de pots d'acné et de pop corn mélés...

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  4. Ta critique commençait bien, et puis je t'ai perdu en cours de route . Je reprocherais au film de vouloir faire dans
    trop de genres différents et d'au final ne convaincre dans aucun réellement. Ca commence gentiment, avec une histoire pleine de clichés, mais bon c'est sympa, frais, (un peu trop) kitsch, puis
    d'un coup revirement de situation vers une dénonciation politique, à mon avis bien trop complexe pour un genre comme la comédie musicale. Et le comble est sans doute cette fin, complétement
    surréaliste, où tout se résout en deux minutes, histoire qu'on ait notre happy end. Mis à part ça, je suis d'accord sur le fait qu'il y a de bonnes reprises ("La bonne étoile", "Sauver l'amour",
    "Un autre monde"). A noter que les meilleures sont celles qui ne sont pas dansées (la faute à un manque de moyens qui se voit à l'écran). Beau travail sur les lumières aussi et excellent casting
    au charme indéniable.

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  5. Le spectateur l'emporte toujours sur le cinéphile

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