vendredi 12 novembre 2010

L’homme qui voulait vivre sa vie, d’Eric Lartigau (France, 2010)



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Note :
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Paul Exben est un avocat pour qui les affaires marchent bien. Il aurait bien sûr préféré être un grand photographe, pour vivre sa passion, mais il a du choisir, à un moment, d'être "quelqu'un de
sérieux" afin de subvenir aux besoins de sa famille : une femme de moins en moins aimante (Marina Foïs) et deux petits garçons... Quand sa "patronne associée" (divine et espiègle Catherine
Deneuve !) lui dit qu'elle va mourir bientôt et que l'on ne peut rien y faire, le renvoyant au possible de sa disparition à lui sans qu’il ne se soit accompli comme il l’aurait voulu, les
perspectives de sa propre vie semblent se fissurer inexorablement, comme si quelque chose était en train de défaillir ou de dérailler... Mais est-ce lui qui déraille ? Ou toute sa vie qui
s'effondre autour de lui, depuis bien longtemps déjà, même s'il ne le remarque que maintenant ? D'ailleurs, avant même que sa femme ne le quitte pour demander le divorce, on le sent déjà parti
ailleurs : il n'y a qu'à le voir à cette soirée de bobos mégalos, constamment en retrait, dans un inconfort permanent, jetant désormais un œil distant et critique sur la petite vie étriquée qu'il
s'est doucement forgé, renoncement après renoncement, compromis après compromission de ses désirs...

Avec cette histoire de couple qui défaille, parce que la femme reproche à son mari de ne pas être assez présent, de trop travailler alors que c'est justement une des conditions sine qua non du
train de vie qu'elle exigeait, on nage en plein drame petit bourgeois, sournois et faux derche. Si c'est effectivement le cas au début, les apparences sont trompeuses, puisque le film opère un
basculement progressif de la notion de genre cinématographique... Tout n'était visiblement qu'apparences construites sur du vide dans cette petite vie rêvée toute faite et prête à l'emploi, ce
qui aura probablement convaincu la femme, oisive, de se prendre un amant. Il est intéressant de noter que l'amant est d'ailleurs une projection (en "négatif", puisque le personnage tient plus du
raté vantard) de ce qu'aurait voulu être Paul : un photographe professionnel ! Quand Paul tue justement l'amant par accident, le film se transforme pour de bon et s'oriente pour un temps vers le
thriller, le temps de se débarrasser du corps, avant de s'apaiser à nouveau...

C'est alors qu'un troisième film commence, probablement le plus intéressant. Ayant éliminé l'amant, qui avait en réalité la vie rêvée de Paul, Paul s'élimine lui-même, laissant croire à sa mort,
pour pouvoir usurper l'identité de l'amant, récupérant finalement par un jeu de déplacements identitaires sa véritable existence : la vie qu'il voulait vraiment vivre, comme le clame le titre du
film... C'est donc en devenant quelqu'un d'autre (mais qui était en réalité une inversion de son "moi" fantasmé) que le personnage principal va parvenir à se réaliser et à devenir lui-même !
Etrange paradoxe, qui est l'essence et le moteur même du film, passionnant dans sa capacité de se réinventer en permanence, exactement comme son personnage... Si le passage de Paul d'un milieu
bourgeois parisien à une vie simple dans un coin perdu au milieu de la nature dans un pays étranger est réellement un moment très très beau et très émouvant, il ne tiendra pas lui non plus, comme
si Paul ne pouvait en fin de compte jamais la vivre, sa vie... A moins que ce ne soit justement en la recommençant constamment qu'il se sent "vivre" vraiment : la fin ouverte sur cet intense et
beau personnage (incarné à merveille par un Romain Duris très impliqué) donne d'ailleurs l'image d'un être libéré et libre, prêt à conquérir enfin le vaste monde !



 



Mise en perspective :



- L’arnacoeur, de Pascal Chaumeil (France, 2010)



- Persécution, de Patrice Chéreau (France, 2009)































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4 commentaires:

  1. Pour moi c'est une petite déception... Le film met du temps à s'installer (avant l'accident c'est en fait sans grand intérêt). La seconde partie est largement la meilleure où devenu photographe
    il jongle avec son anonymat sans compter la présence de Niels Arestrup toujours grandiose. Jusqu'ici le scénario est un peu décousu mais devient plus palpitant... Jusqu'à cette dernière partie
    râtée, cette espèce de message pseudo politique facile et démagogue. La fin très et trop ouverte qui n'a rien à voir avec le livre mais en plus qui n'a rien de cohérent avec le reste du film.
    Tout juste une étoile donc pour les acteurs (Deneuve impeccable, Foïs dans un rôle ingrat et Duris bien entendu) et le milieu du film seule partie maitrisée et interessante. 1/4

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  2. Plutôt d'accord avec cette critique d'un film existentiel mais certainement pas fantaisiste. Par contre, je serai plus contrasté envers la performance de Romain Duris qui est très bon par moments
    (seconde partie du film) et très mauvais par d'autres (première partie). Après, la performance d'un acteur relève d'une extrême subjectivité.

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  3. J'ai adoré ce film qui est resté trop confidentiel à mon sens...

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  4. eh oui, l'univers des sorties ciné est devenu impitoyable ! (pire que celui de dallas, je crois...)

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