jeudi 21 octobre 2010

La tisseuse, de Wang Quan An (Chine, 2010)



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Note :
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Avec « La tisseuse », Wang Quan An réussit un très beau long métrage, à la fois sobre et émouvant, filmé avec beaucoup de délicatesse. Quand Lily, coincée entre son dur travail mal rémunéré de
tisseuse à l’usine, un mari qu’elle n’aime pas et un fils qu’elle a un peu de mal à apprivoiser, apprend qu’elle va mourir bientôt, atteinte d’une maladie grave, elle décide de partir à la
recherche de son grand amour passé, dont elle avait du se séparer dix ans auparavant…

Si le terrible mélodrame de la pauvre vie de Lily reste au cœur du film, « La tisseuse » n’en demeure pas moins le portrait sans concession d’une société chinoise prolétarienne dure et mourante,
à l’image de son héroïne… Les conditions de travail déplorables, l’impossibilité de se faire soigner à cause des coûts disproportionnés de la médecine pour de modestes ouvriers, la domination
masculine (les hommes sont mieux rémunérés, les médecins parlent de la maladie des femmes à leur mari et non à la femme), les anciens chants soviétiques de la chorale à l’usine (le titre du film
est d’ailleurs celui d’une de ces chansons), etc. La dureté de ce monde est soulignée par une atmosphère pesante et la lenteur de certains plans, expressions de la douleur sociale ou amoureuse
des personnages… « Tout change trop vite » dit un vieil homme sur les décombres de ce que fut il n’y a pas si longtemps sa maison, dont les dernières traces vont très vite disparaître pour
laisser place à l’oubli : Wang Quan An décrit finalement un pays qui se reconstruit en permanence, sans nécessairement tenir compte des erreurs passées… Un pays sans mémoire, tragique et
désespéré !

Pour qui économise-t-on ce peu d’argent que l’on gagne ? Pour qui vit-on ? Faut-il attendre de mourir pour commencer à vivre ? En évoquant la mort aussi frontalement, le cinéaste rappelle surtout
que la vie devrait être plus libre et enivrante : "Mourir est le plus grand problème auquel chacun doit faire face. Dans la Chine d'aujourd'hui, où la religion n'est pas très répandue, personne
ne nous explique comment on doit vivre cette expérience. Les chinois souffrent donc plus que les autres à ce sujet. Mais en tournant ce film, j'ai pris conscience que la mort n'est plus si
terrifiante, l'existence n'est plus aussi désespérante. La mort n'est qu'une étape finale à franchir. En fait, accepter la mort, c'est rendre hommage à la vie". En filmant sa merveilleuse
actrice, Yu Nan, Wang Quan An livre une fable forte et terrible, où la poésie surgit de la noirceur du quotidien…



 



La Tisseuse



Un DVD édité par : M6 Vidéo



Date de sortie : 5/10/2010







Mise en perspective :



Le cancer au cinéma



 



Critique réalisée en partenariat avec
cinetrafic































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4 commentaires:

  1. eh bien ça fait bien envie ça, surtout que j'avais raté le film lors de sa sortie...

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  2. Les Chinois reconnaissent dans la constellation de la lyre et l'étoile Alpha, la tisserande et son métier ; elle tisse sur le bord du fleuve Céleste de la Voie lactée.


    J'ai lu ça y'a pas longtemps et ça m'a rappelé le film, pourtant rien avoir avec l'ambiance et le vacarme des usines chinoises..

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  3. Je l'ai vu au cinéma et j'ai été assez déçu, même si l'histoire est intéressante et le tableau de la Chine qu'il donne à voir impressionnant. Manque de rythme, principalement.

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  4. c'est un rythme lent, certe, mais ça rend les choses très belles... je pense notamment à cette longue conversation de la fille avec son ancien amour dans un restaurant... c'est émouvant !

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