vendredi 24 septembre 2010

Homme au bain, de Christophe Honoré (France, 2010)



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Note :
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Homme au bain... Peau de lapin !



 



Même lorsqu’il réalise à la légère, en « mode mineur » dirons-nous, Christophe Honoré parvient à livrer une œuvre riche et passionnante ! « Homme au bain », qui devait en réalité n’être qu’un
moyen métrage en réponse à une carte blanche proposée par le théâtre de Gennevilliers, a ainsi miraculeusement été étiré en long, dans lequel le cinéaste ose explorer avec panache ses obsessions,
les thématiques du corps et du désir…

Au fond, le film ne raconte que peu de chose : deux garçons se séparent le temps d’un voyage professionnel à New York pour l’un d’eux, mettant à l’épreuve leur relation visiblement déjà bien
compromise… Christophe Honoré plante d’abord un décor : une banlieue de barre HLM (Gennevilliers), où il ne filme pourtant que des gays parfaitement affirmés, loin du coup de l’image des jeunes
sauvageons qui enflamment les voitures. Le réalisateur filme-t-il un fantasme de banlieue, issue d’un imaginaire homo-érotique bien connu ? La sensualité et la sexualité brute du film ne fait
d’ailleurs que commencer : de nombreuses scènes s’attardent sur des corps nus, respirant le désir, dansant et faisant l’amour avec d’autres corps… L’emploi d’une star du X, François Sagat, n’a
d’ailleurs rien d’innocent : mais si l’acteur est filmé dans des trips sexuels à la marge et souvent brutaux, on retient surtout l’extrême sensibilité qui émane de ce corps tout en muscles qui se
meut avec une candeur déconcertante, de ce regard de petit enfant perdu, de cette démarche parfois mélancolique… Honoré trouve d’ailleurs là une très belle illustration de l’un de ses roman, « La
douceur » : sous la dureté des apparences se cache toujours une douceur des choses, une émotion… L’introduction du film assène d’ailleurs l’idée avec conviction : avant que son amant le quitte,
le personnage de Sagat l’oblige à faire l’amour une dernière fois, malgré ses réticences. Est-ce un viol ou une preuve d’amour ? C’est bien là toute l’ambiguïté des sentiments. L’autre reviendra
pourtant, guidé par l’amour…

Honoré profite de cette œuvre expérimentale en forme de parenthèse dans sa carrière pour « se vider » entièrement de ses fantasmes, bien sûr, mais surtout de toutes ses obsessions que l’on
n’avait jamais vu aussi prégnantes à l’écran jusque-là. Le film est une nouvelle fois truffé de références littéraires : le réalisateur aime filmer les livres, leurs couvertures et nous le prouve
une nouvelle fois… Cela aboutit d’ailleurs à une scène merveilleuse et d’une étonnante drôlerie : sur le point de se prostituer auprès d’un voisin plus âgé, Emmanuel (François Sagat) se retrouve
entièrement nu devant une bibliothèque pleine de livres… De ce décalage naît le choc de la pornographie et de l’intellect, en d’autres termes du profane et du sacré : Honoré filme l’homme comme
il est, en somme, dans sa totalité la plus paradoxale…

Les séquences à New York donnent au film un aspect documentaire : le personnage est censé suivre la tournée promotionnelle d’une actrice (Chiara Mastroianni) et la filmer à cette occasion.
Récupérant des images de la présentation de « Non ma fille tu n’iras pas danser » en Amérique, Honoré offre à son film l’occasion de séquences cocasses ou semi-poétiques : des petits commentaires
mal sonorisés de Chiara, la découverte d’un sosie d’Al Pacino jeune (miam !), et l’occasion de multiples rencontres… Des rencontres et encore des rencontres, en effet, qui peuvent déborder à
l’horizontal pour de nouveaux rapprochements sensuels, encore…

Et puis on admire enfin les cadrages incroyables du cinéaste, les errances de la caméra conférant une dimension quasi expérimental au film, l’exploration magnifique des corps de jeunes hommes en
émois, leur découpage plan par plan, cette poésie du quotidien qu’Honoré sait si bien mettre en scène… La notion de « cadre » s’adapte en outre parfaitement à cet « Homme au bain », nourri
d’influences multiples, de cinéma bien sûr, mais peut-être bien plus encore de peinture ! Le titre même du film apparaît effectivement comme une parodie virile de toutes ces toiles de maîtres
intitulées « Femme au bain » qui parcourt l’histoire de l’art, mais reprend surtout le nom d’un
tableau de Gustave Caillebotte
, image d’un homme de dos s’essuyant après la sortie du bain, reprise très exactement sur l’affiche du film… Si Emmanuel n’est pas une « œuvre d’art », comme le
lui reproche son riche et vieux voisin, Christophe Honoré sait rapprocher avec brio et subtilité le prosaïsme de la bestialité du corps et la poétique de l’art !



 



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"Homme au bain" de Gustave Caillebotte































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3 commentaires:

  1. Tu crois qu'il faut que j'envoie une photographie de mes bouquins à François pour qu'il vienne en lire les titres tout nu ? hein ? mmmm

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  2. Mais il viendra faire les poussière si je mets la musique ad hoc... non ? ^^


     

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  3. les poussières... et le ménage en grand !

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