CineMADness : Petits suicides entre amis, de Goran Dukic (EU,GB, 2006)

 

Note :

 

Nouvelle société de distribution française, spécialisée dans le "cinéma d'un autre genre", Cinemadness permet cet été à quatre films de connaître
le privilège de la sortie en salles, alors que leur caractère particulièrement "hors-norme" les vouaient très probablement à ne jamais être distribués en France (ou au pire à sortir directement
en DVD).

 

Si « Petits suicides entre amis » ("Wristcutters : a love story" en VO) n’a rien à voir avec le roman du finlandais Arto Paasilinna portant le même titre français, il n’en demeure pas moins une
coproduction britannico-américaine, réalisée par un cinéaste croate (Goran Dukic) et adaptée d’une nouvelle de l’israélien Etgar Keret… Autant dire que le film est au carrefour d’influences très
diverses et cosmopolites ! Il dénote en outre une véritable détermination à l’innovation, notamment technique, puisque pour l’évocation visuelle du monde des « suicidés », l’utilisation d’une
pellicule infrarouge très spécifique (utilisée normalement à des fins militaires) a permis de donner une texture et des couleurs très particulières à l’image. Mais ce qu’il faut d’abord
reconnaître à ce long métrage, c’est sa capacité toute naturelle à utiliser un sujet plutôt grave et sombre (le suicide) pour en tirer une petite comédie fantastique animée et sympathique…

Tout commence par le suicide de Zia, jeune homme un peu triste mais merveilleusement attachant interprété par Patrick Fugit. La scène commence déjà par receler quelque chose d’amusant : après
avoir rangé soigneusement sa chambre dans un bordel pas possible, le personnage se dirige tranquillement vers la salle de bain, grimace devant sa glace et tombe finalement sur le sol, la caméra
nous révélant alors qu’il vient de se trancher les veines… Paf ! Petite ellipse, et on le retrouve alors plongé dans un étrange monde aux allures de purgatoire, dans lequel errent tous ceux qui
comme lui se sont suicidés… Il y est toujours très las d’exister et est devenu vendeur de pizza ! Un jour, il apprend que son ex-fiancée s’est suicidée elle aussi et il décide de partir sur les
routes pour la retrouver… Le film prend alors des allures de road movie inattendu, où la route est bien sûr semée de rencontres étonnantes et de moult mésaventures débridées !

Le ton général de ces « Petits suicides entre amis » se fait clairement potache et le côté complètement hasardeux et débridé de l’aventure se laisse suivre plaisamment… Certes, l’attention se
relâche parfois et un sentiment d’étirement du film le rend parfois un brin ennuyeux, mais l’ensemble demeure de bonne tenue et la liberté qui émane de ce petit objet filmique improbable fait
rudement plaisir à voir ! Humour tempéré, séquences absurdes et paranormales, personnages haut en couleurs… on ne peut finalement qu’être intrigué par ce délire frénétique et dispersé, mélange de
genres et de tonalités incongrus mais en cela même réjouissant ! La fin aux frontières de la comédie romantique étonne agréablement, quand le suicidé se réveille enfin dans une chambre d’hôpital,
où se réveille avec lui une jeune fille dont il est tombé amoureux dans le monde étrange dont il revient peut-être : un sourire complice échangé entre elle et lui, qui se communique à son tour à
la commissure de nos lèvres ébaubies !

 

Mise en perspective :

- Le site de Cinemadness

- Confession d'un cannibale, de Martin Weisz (Allemagne,
2007)

- Grace, de Paul Solet (Canada, Etats-Unis, 2008)

- Donkey Punch, d’Olly Blackburn (Grande-Bretagne, 2007)