dimanche 4 juillet 2010

The Devil and Daniel Webster (Tous les biens de la Terre), de William Dieterle (Etats-Unis, 1941)


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Note :
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Malchanceux et endetté jusqu’au cou, Jabez Stone, un fermier du New Hampshire des années 1840, accepte d’échanger son âme à un certain M. Scratch, contre sept années de prospérité. Il vient en
réalité de vendre son âme au Diable et il apprendra peu à peu, gagné par la cupidité et l’adultère, que l’argent ne fait pas forcément le bonheur… « The Devil & Daniel Webster », film maudit
qui fut longtemps exploité dans des versions mutilées et sous de nombreux titres différents (comme « All That Money Can Buy », « Tous les biens de la Terre »…), propose ainsi une version
réarrangée du mythe de « Faust ». Pour se sauver, Jabez Stone trouvera secours auprès de Daniel Webster, un politicien généreux envers ses semblables et un orateur hors pair, qui parvient à
instaurer un procès pour tenir tête au Diable lui-même et récupérer l’âme de Jabez… A travers ce personnage, inspiré d’un véritable homme politique dont on disait qu’il pourrait convaincre le
Diable tant ses discours étaient habiles, William Dieterle cherche à montrer qu’un politicien qui dénonce l’exploitation de l’homme par l’homme (Webster défend dans le film les paysans contre
leurs usuriers) ne peut pas faire carrière… et Daniel Webster n’accède d’ailleurs jamais à la fonction de Président qu’il convoite, justement parce qu’il n’accepte jamais de se vendre au Démon
!

William Dieterle est un cinéaste atypique. Profondément engagé et anti-fasciste, il fuit l’Allemagne, son pays d’origine, quand le Parti National Socialiste s’y enracine dans les années 30. Aux
Etats-Unis, sa carrière est vite anéantie à cause de ses idées humanistes, qui lui mettent sur le dos les services secrets américains et la vigilance de Hoover… Malgré son cuisant échec à sa
sortie, « The Devil and Daniel Webster » demeure pourtant un très grand film, enfin visible en DVD dans sa version intégrale d’origine. Devant et derrière la caméra (comme ils sont mentionnés au
générique du film), de grands noms y sont d’ailleurs à l’œuvre : la musique (souvent très significative) est signée Bernard Herrmann, le montage a été réalisé par Robert Wise, Edward Arnold
interprète Daniel Webster et l’excellent Walter Huston (le père du cinéaste John) joue un Démon aux allures de diablotin joueur et rigolard…

Mais c’est la réalisation de William Dieterle qui confère au film tout son relief et sa profondeur ! Les contrastes sur le noir et blanc, les jeux d’ombres et de lumières sont bien souvent
saisissants et superbes, dans la veine d’un expressionnisme Allemand que connaît bien Dieterle. De nombreuses séquences font preuve d’une grande inventivité de mise en scène : c’est le cas par
exemple de la scène où des invités fantomatiques se mettent à danser à la soirée qu’organise Jabez devenu riche ; il s’agit en réalité de véritables fantômes et Dieterle a l’idée de les rendre
flous à l’écran, créant ainsi une vision très particulière… Les dialogues sont finement écrits, en particuliers lors de la scène du procès, d’où le Diable sort chassé à coups de pied dans le
derrière par Daniel Webster : le film sait ainsi faire passer un certain humour. La dernière image du long métrage en est d’ailleurs un autre exemple marquant : le Diable semble chercher au loin
une nouvelle victime à qui prendre son âme, quand soudain il lance un regard caméra au spectateur, à la fois blagueur et sournois, l’avertissant que ce pourrait bien être lui… Face au personnage
de Webster, on pense enfin aux films de Frank Capra, et à tous ses personnages si généreux qu’ils seraient prêts à se perdre eux-mêmes pour sauver leurs prochains… Oui, c’est certain, « The Devil
& Daniel Webster » est l’œuvre d’un grand humaniste, hélas trop longtemps oublié !

Bonus DVD :
La sortie DVD inespérée du film propose en outre des bonus de qualité ! On retrouve notamment un portrait passionnant du cinéaste William Dieterle par Hervé Dumont, qui propose également un
regard plutôt éclairant sur le film… A cela s’ajoute une version radiophonique d’époque de la nouvelle signée Stephen Vincent Benet de laquelle le film est adapté (une petite curiosité !) et un
court métrage plus tardif de Dieterle pour la télévision, évoquant une étonnante épidémie de fièvre aphteuse qui fragilise des fermiers de Californie, refusant de voir abattre tous leurs
troupeaux... Indispensable à sa vidéothèque !



 



The Devil and Daniel Webster :



Un film de William Dieterle avec Edward Arnold et Walter
Huston



 Distribution : Carlotta Films



Fiche produit boutique Carlotta



Date de sortie : 16/06/2010



 



Critique réalisée en partenariat avec
cinetrafic































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3 commentaires:

  1. Voilà une chronique bien alléchante qui me donne une furieuse envie de me procurer ce dvd. Dumont qui apparaît sur le dvd est l'auteur d'un ouvrage sur le réalisateur (ainsi que d'un pavé de
    référence sur le Peplum) et parle donc en spécialiste. J'ai en mémoire quelques titres fabuleux de Dieterle tournés lors de son exil américain. Parmi les plus beaux "le portrait de Jennie",
    très marqué par l'expressionnisme allemand (lui qui fut acteur pour Murnau) et évidemment le flamboyant "Duel au soleil" dont il partage la paternité avec King Vidor.

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  2. "le portrait de Jennie" est chroniqué sur mon blog, ainsi que "scarlet dawn" tourné dans les années 30 avec Doug Fairbanks Jr, plus mineur. Si tu veux jeter un oeil (revue 90 et séquence 17).

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  3. merci de l'info ! tout est bien rangé sur ton blog ! :)

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