Adam’s apple, d’Anders Thomas Jensen (Danemark, 2006)

 

Note :

 

"Adam's apple" est un film absolument étonnant et passionnant. Son traitement décalé et son humour bien particulier en font une œuvre tout à fait originale, qui ne ressemble probablement à aucune
autre... On y découvre la vie quotidienne dans une petite communauté religieuse formée par des repris de justice, que le pasteur Ivan recueille les bras ouverts et les joues tendues vers eux, en
se persuadant d'emblée que tout homme est bon. Ses méthodes sont d'une naïveté et d'une permissivité absolue, laissant finalement chacun à son libre-arbitre, n'exigeant de ses "brebis galeuses"
que l'exécution d'une mission bien définie au cours de leur séjour dans la paroisse... Pour Adam, nouveau venu fraîchement sorti de prison, ce sera de cuisiner une tarte au pommes pour tout le
monde avec les fruits de l'arbre du jardin, lorsque ceux-ci seront murs... Le temps de la maturation sera cependant traversé de multiples épreuves, comme autant de représentations symboliques du
mal : les corbeaux, les vers, la foudre...

On se retrouve clairement dans une dialectique spirituelle entre le mal et le bien, avec la question de la foi, de la place de l'homme dans le monde, des conséquences de ses actions, de la nature
et de l'origine de dieu ou du diable... Mais s'il pose beaucoup de questions, le film n'a pas la prétention d'y répondre et n'assène aucune vérité ! Profondément ancré dans la métaphysique,
"Adam's apple" offre surtout une illustration déjantée et déroutante des comportements humains, en insistant surtout sur les pires... On sort de là plein de questions, certes, mais le but du film
n'est cependant pas de nous assommer avec un traité théologico-philosophique trop pompeux : on salue en effet les beaux efforts du cinéastes de nous offrir un spectacle vivifiant et ludique,
débordant de situations cocasses et d'un humour "ovni" des plus réjouissant ! Délirant, drôle et tragique à la fois, ce long métrage inoubliable réserve bien des surprises : un chat blanc parmi
des corbeaux noirs dans le pommier, dégommé à coup de pistolet en même temps que les oiseaux, un pasteur battu à mort qui pardonne toujours sans la moindre hésitation, au point d'en paraître
carrément ridicule, un portrait d'Adolf Hitler (Adam est un "néonazi") qui n'en finit pas de se décrocher du mur, une musique que le pasteur veut imposer sur l'autoradio de la voiture... "Adam's
apple" fourmille d'idées neuves et renversantes, multiplie le comique de répétition percutant, distille une atmosphère à la fois dérangeante et enivrante... et finit par offrir à l'écran une
parabole fascinante et déstabilisante, définitivement vivifiante pour tous les spectateurs qui oseront aller le voir !