samedi 3 avril 2010

Les témoins, d’André Téchiné (France, 2007)



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Note :
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Avec « Les témoins », Téchiné signe peut-être son plus beau film, le plus déchirant et le plus émouvant, comme une œuvre profonde et inspirée, tournée « à vif » et quasi viscéralement… Il y
présente l’évolution de quelques personnages au cours des années 1980, pris dans le tourbillon de la vie. Il y a le jeune Manu, que le « vieux » Adrien rencontre sur un lieu de drague homosexuel,
qu’il prend sous son aile et qu’il présente à son amie Sarah, qui vient d’avoir un enfant qu’elle n’arrive pas à aimer… Elle forme avec Medhi un couple libre, et Medhi sera surpris d’entamer une
liaison avec le jeune Manu, qui bientôt se mourra d’une terrible maladie, dont personne n’avait encore jamais entendu parler… C’est un film intensément romanesque, fluide et vital, entre ombre et
lumière, qui nous embarque avec lui dans la folie du désir et de la mort, de l’éros et du thanatos, c’est à dire de la vie ! Tous les acteurs sont parfaits pour nous faire partager cette aventure
: de Michel Blanc à Emmanuelle Béart, en passant par Sami Bouajila ou le jeune Johan Libéreau…

Comme son titre l’indique, ce film est avant tout un témoignage. Le témoignage à une échelle réduite de quelques individus s’étant trouvés aux premières loges des « années SIDA » et de leurs
terribles conséquences en matière d’amour et de mort. Tout au long du film, on passe d’un personnage à l’autre, passant d’un désir à un autre. Comme le fait remarquer un personnage, dans la vie «
le centre » se déplace tout le temps, chacun aura finalement son rôle à jouer… Quant à savoir s’il y a des êtres « dans la vie » et d’autres qui n’y sont pas, cela aussi sera rendu aléatoire au
fil du récit. Si Adrien, le médecin qui étudie la mort des autres, est considéré en dehors de la vie par Medhi, qui « baise » à tout va, la fin du film donnera à Adrien une nouvelle chance,
malgré son âge, pourtant si segmentant dans sa « communauté »… Et si Manu, qui éclaire le film avant de l’assombrir par sa mort, semble d’abord être la « clé » du récit, c’est Sarah qui prendra
sa relève en cours de route, en reprenant avec force ce désir et ce besoin de témoigner plus que tout autre chose, témoigner dans l’urgence du passage de ce jeune homme parmi les autres hommes,
dont elle tirera un texte que l’on entend en voix off à plusieurs reprises pendant le long métrage. Avec ses quelques « témoins » privilégiés, archétypiques mais jamais caricaturaux, André
Téchiné parvient à hisser son film au rang de représentation d’une époque, avec une universalité et une passion bien plus grande qu’un simple documentaire ou un film plus « historique » ! Il
livre une œuvre puissante et bouleversante, qui touche miraculeusement les âmes…

Car à travers le prétexte historique, il propose aussi un grand film d’amour, avec ce qu’il faut de sensualité et de tragique… L’amour semble d’ailleurs constamment le moteur des actions des
personnages et c’est toujours ce qui les motive à vivre. Adrien ne travaille-t-il pas sur le SIDA justement par amour pour Manu, avec qui il ne se passera pourtant jamais rien ? De très belles
réflexions sur le thème ponctuent également la narration, notamment dans les mots que nous livre en auteur omnisciente le personnage d’Emmanuelle Béart : l’amour n’a pas d’âge, l’amour n’est pas
toujours tel qu’on le croit, l’amour n’est peut-être pas fait pour tous (superbe et subtil personnage solitaire que celui de la sœur de Manu, joué par Julie Depardieu)… Et puis ces témoignages
sur la communauté gay, plutôt forts et justes, où l’on reconnaît certaines préoccupations du réalisateur : l’amour clandestin, la condamnation aux lieux de dragues et au seul amour physique… Si
Manu a aimé Medhi plus que les autres, comme il le dit, c’est parce qu’il a été sa seule « exception », tout simplement parce qu’il ne l’a pas rencontré comme les autres, parce qu’il l’a connu
dans la vie…































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12 commentaires:

  1. Je n'aime pas spécialement les films français (récents). Surtout si il y a Julie Depardieu et Michel Blanc... Un autre film 4 étoiles que je risque de ne pas aimer ?

    Bon j'arrête lol, je ne l'ai pas vu donc je ne critique pas ! D'autant plus que tu n'as pas l'air d'être le seul à
    aimer ce film vu les notes sur Allociné !

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  2. Ben, mince alors je l'ai encore raté celui-là...J'ai toujours trouvé ce titre un peu prétentieux...Mais promis je le verrai bientôt ! Le nombre de tes étoiles m'impressionne. 

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  3. Je suis d'accord : un des tous meilleurs Téchiné. Au même niveau que Les Roseaux sauvages, un must dans la filmo du monsieur...

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  4. je suis d'accord, c'est un très beau film, qui m'a fait pleurer comme jamais. un petit bémol, histoire de faire le chieur : le personnage joué par Emmanuelle Béart est un peu stéréotypé je
    trouve, ses traits un peu forcés.

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  5. Je me suis mal exprimé : Les films francais que je regarde sont très souvent des sombres bouses. Mais il faut dire que je n'en regarde pas tant que ca. Bien évidemment il y a des pépites, comme
    Un prophète et d'autres que j'ai oublié.
    Si tu as d'excellents films francais à me proposer je suis preneur 
    Je ne suis pas complètement borné quand même

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  6. Monsieur K..., je ne saurais trop vous conseiller de vous jeter rapidement (si vous ne les connaissez pas bien sûr) sur les films d'Arnaud Despléchin, de Claire Denis, d'Emmanuel Finkiel,
    Abdellatif Kechiche ou Rabah Ameur-Zaïmeche, parmi quelques cinéastes français récents (ou plus ou moins récents) qui me paraissent tout à fait recommandables. Vous m'en direz des nouvelles
    et si vous trouvez que ce sont de "sombres bouses", alors vous serez définitivement perdus !!!

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  7. Merci Eric pour toutes ces références ! C'est la que je me rends compte de ma méconnaissance. Pour moi le cinéma français se résume à Luc Besson... Mea culpa.
    Je vais prendre le temps de regarder leurs films.

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  8. Ah, le forum des images, ça me revient... On avait vu un extrait assez long, il me semble, impossible de me souvenir du thème de la conférence...

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  9. Je n'irais certainement pas jusqu'à parler de chef-d'oeuvre. Je ne dirais certes pas que ces chassés-croisés m'ont paru insipides, loin de là, mais je n'ai pas le souvenir ni d'une émotion aussi
    forte que celle que tu décris, ni d'une portée si grande que cela du film. Téchiné, dont j'ai pu voir MA SAISON PREFEREE, LES SOEURS BRONTË, RENDEZ-VOUS, LES TEMPS QUI CHANGENT et LES EGARES,
    livre toujours de très beaux drames humains, avec des thèmes dont on sent qu'ils le taraudent, mais ne parvient jamais à marquer bien longtemps au-delà du visionnage du film - en tout cas en ce
    qui me concerne. Je ne sais pas si cela peut constituer un critère d'évaluation d'un film, je ne pense pas d'ailleurs. En tout cas, cela veut dire que ses films méritent d'être revus souvent, et
    c'est bien ce que je compte faire pour LES TEMOINS...

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  10. Pareil : Chef d'oeuvre, point barre...


     


     

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  11. Eric Popu & Phil Siné > J'ai pensé à vous lors de mes achats sur Cdiscount. J'ai pris un film de Téchiné (j'ai pas trouvé Les témoins, donc j'ai pris Les temps qui changent) et un de
    Abdellatif Kechiche (L'esquive). 

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  12. c'est gentil de penser à nous comme ça... ;)


    bon visionnage alors !

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